Qu’est-ce qu’une entreprise « responsable » ? Part 3

Philippe | 8 mars 2019 | 0 commentaires
Temps de lecture : 10 minutes

Part 3 : Une entreprise responsable : un employeur responsable.

 

 

Dans deux précédents posts, nous avions vu l’une des caractéristiques de l’entreprise responsable, à savoir qu’elle se devait d’être honnête et juste, puis une citoyenne active .

Le troisième attribut que doit être capable d’assumer une entreprise se voulant responsable est sa responsabilité en tant qu’employeur, c’est-à-dire sa capacité à prendre en compte les êtres humains qui la composent.

 

A travers son mode de fonctionnement, une entreprise se voulant être un employeur responsable doit remplir quatre principaux critères :

. Traiter tout le monde avec dignité, et fournir une rémunération équitable à tous,
. Permettre et accueillir un dialogue constructif sur son comportement en restant fidèle à ses objectifs,
. Favoriser l’innovation, le leadership et la responsabilité personnelle,
. Protéger et encourager tous ceux qui travaillent pour l’entreprise pour assurer qu’ils puissent aussi apprendre, contribuer à l’effort commun et prospérer.

 

 

1. Traiter tout le monde avec dignité, et fournir une rémunération équitable à tous.

 

Traiter une personne avec dignité, selon la définition du dictionnaire, consiste à considérer quelqu’un, non pas comme un moyen, mais comme une fin en soi.


On voit que, dans notre organisation de production actuelle, envisager les choses de cette manière constitue une vraie gageure. Considérer le bonheur des membres de l’entreprise comme primant sur le niveau de rentabilité… J’ai presque l’impression de dire une grossièreté en avançant un tel postulat tellement il semble naïf et déconnecté des réalités.


Les exemples d’entreprises ne considérant certains de leurs collaborateurs que comme des moyens de production sont légions, notamment dans les grands groupes, et rares les exemples contraires.


Il est, en effet, plus simple, pour des dirigeants, de se contenter de chiffres comme outil de gestion plutôt que de plonger dans la complexité de la gestion de la dignité humaine. D’autant plus que les syndicats, contrepouvoir nécessaire, ne facilitent pas toujours les choses en s’arrogeant souvent le monopole de ce sujet.


Pourtant, préserver la dignité de chaque membre de l’entreprise, au-delà d’une approche morale, est une démarche économiquement justifiée.


Ne pas considérer la rentabilité comme primant sur tout le reste ne consiste pas à en minorer l’importance. Nous savons tous que seule une entreprise rentable est pérenne et que, si elle ne l’est pas, elle disparait, comme les emplois qu’elle propose et que, sans emploi, ses ex-salariés risquent fort de perdre en dignité.


Le sujet est, en fait, de considérer que la rentabilité est une conséquence et non un but. Pour cela il faut des dirigeants capables de prendre de la hauteur. Il faut des leaders à même d’envisager le fait que sécuriser la rentabilité passe moins par un contrôle pointilleux de chaque action des collaborateurs que par la certitude qu’en défendant des valeurs élevées chacun donnera le meilleur de lui-même et génèrera un cercle vertueux de rentabilité.


Bisounours ? Peut-être… Plus difficile qu’une gestion priorisant avant tout la rentabilité ? C’est certain, mais tout bon dirigeant sait que c’est dans le dépassement de la difficulté que réside la performance.


La difficulté vient, notamment, du fait que, si certaines règles de fonctionnement peuvent être mises en place au niveau de l’entreprise et imposées aux collaborateurs par des procédures normées (payer les fournisseurs ou les taxes rapidement, par exemple), sur le sujet de la dignité des collaborateurs comme sur celui de l’équité de rémunération, seule la qualité des hommes qui composent l’organisation peut permettre d’atteindre un tel objectif.


Va-t-il falloir, dès lors, se résoudre à faire confiance à l’être humain pour assurer la pérennité du système capitaliste ? Peut-être qu’en acceptant de le former, non pas seulement à des savoir-faire techniques, mais à des systèmes de comportement et de pensée, cette confiance deviendrait-elle possible…

 

 

2. Permettre et accueillir un dialogue constructif sur son comportement en restant fidèle à ses objectifs.

 

Sur ce point, il s’agit de construire et d’animer un mode de relations entre individus qui ne soit pas basé sur la rivalité et la concurrence, mais sur l’enrichissement par le respect de la différence.


Il ne s’agit pas d’être totalement perméable à toutes les critiques, ce qui aboutirait à une déstabilisation néfaste de l’individu, il s’agit de bénéficier de l’apport que constitue la différence de l’autre.


La Direction d’entreprise peut mettre en place des occasions, organiser les circonstances pour construire et mener ce dialogue. Cela aura pour avantage de lui fournir un cadre « institutionnel ». Le qualificatif de « constructif » ne peut toutefois se décréter et le dialogue ne peut l’être que dans la mesure où les hommes qui le mènent en ont la volonté, ont conscience des enjeux que cela représente et adhèrent à cette vision des choses.


Seule une bonne connaissance de soi-même, de ses valeurs, du sens de son action et de ses objectifs permet d’affronter la différence, et donc le dialogue, pour s’en enrichir sans s’en fragiliser.


Certaines techniques comme celle de l’évaluation du « 360° feedback », introduites dans les années 90, vont dans ce sens et présentent l’avantage d’apporter la vision de ce qu’une personne génère comme réaction dans son entourage, mais elles ont également l’inconvénient de ne susciter que des appréciations anonymes et donc de ne pas être un dialogue. L’aspect progrès est unidirectionnel et pas autant fédératif qu’il pourrait l’être. Si une remarque se répète parmi les avis recueillis, on aura tendance à la considérer comme justifiée, ce qui n’est pas forcément le cas. On raisonne, en fait plus en termes de statistique que de dialogue.


En tout état de cause, pour être en mesure de tirer parti pleinement d’un dialogue sur son comportement, il faut avoir une personnalité suffisamment forte, au sens de stable. Sans cette stabilité toute remise en question devient agression, l’agression fragilise, la fragilisation génère la peur, la peur entraine un besoin de protection qui se concrétise souvent par le refus d’évoluer.


Le sujet devient, encore une fois, la prise en compte de la qualité de l’humain dans un raisonnement d’entreprise. La grande qualité de l’humain est de pouvoir évoluer à l’infini. Peut-être que si les dirigeants acceptaient d’assumer un rôle de construire l’être humain à travers une promotion résolue des comportements fédératifs en entreprise, les collaborateurs seraient renforcés et, ainsi, plus à même de participer à leur progression mutuelle. La première à en bénéficier, en termes d’efficacité, serait l’entreprise elle-même.

 

 

3. Favoriser l’innovation, le leadership et la responsabilité personnelle.

 

C’est, en quelque sorte, ce à quoi l’on aboutit en ayant correctement mis en place le point précédent.


Accoutumé à une remise en question, à travers une confrontation directe constructive avec l’opinion de l’autre, le collaborateur normalise de lui-même une attitude de curiosité et d’exploration de voies nouvelles.


Si cette évolution dépend, bien entendu, de la personnalité de chacun, le fait d’être à l’origine d’une innovation, même mineure, va stimuler le désir du collaborateur d’être à la manœuvre pour sa mise en place concrète. C’est donc un moyen efficace de faire émerger les talents de leader là où ils se trouvent, au plus grand bénéfice de l’organisation à laquelle ils appartiennent.

 

 

4. Protéger et encourager tous ceux qui travaillent pour l’entreprise pour assurer qu’ils puissent aussi apprendre, contribuer à l’effort commun et prospérer.

 

Exiger de chaque membre de l’entreprise qu’il soit un leader charismatique serait, toutefois, une aberration, tant les personnalités peuvent être diverses.


Si le besoin de sécurité, donc de protection, est unanime, il s’exprime à des niveaux différents selon les personnes.


Le premier challenge concernant ce point de la protection dirigée des salariés est de repérer et définir les niveaux et formes de protections à mettre en place.


La loi (Art. L. 4121-1 et suivants du Code du travail) aide en la matière :
L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :


• des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail,
• des actions d'information et de formation,
• la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.


Les principes généraux de cette obligation de l’employeur sont, notamment :
. Eviter les risques,
. Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités,
. Combattre les risques à la source,
. Adapter le travail à l’homme,
. Tenir compte de l’état d’évolution de la technique,
. Favoriser les solutions les moins dangereuses possibles,
. Planifier la prévention,
. Prendre des mesures de protection collective,
. Donner des instructions appropriées aux travailleurs.

 

Le souci est que seule l’implication de chacun permet d’atteindre un niveau de protection global suffisant. Mettre à la seule charge de l’employeur ce sujet rend difficile une protection concrète efficace.


Je suis presque certain que, parmi les rares dirigeants de grands groupes ayant été pénalement mis en cause pour harcèlement moral, à peu près aucun d’entre eux n’étaient informés préalablement de la survenance et du développement de telle ou telle situation de harcèlement moral au sein de leur entreprise.


Ceux qui le sont ont d’ailleurs tendance, par souci de protection d’eux-mêmes, à pousser vers la sortie les collaborateurs représentant une menace potentielle… En la matière, il semble que la loi fabrique plus de chômeurs que de bonheur au travail…


Dans ce quatrième point il y a une dimension d’unité au sein de l’entreprise que l’on ne peut ignorer valablement. La protection des salariés, pour être efficace, doit reposer sur chacun, à son niveau. Si je veux me protéger, j’ai besoin de la protection de mon voisin, donc de sa solidarité.


C’est ce qui est mis en avant dans les unités combattantes de l’armée. Pour être efficaces, elles doivent compter sur un encadrement compétent, certes, mais également sur le voisin immédiat sans lequel il n’y aurait, souvent, pas de survie possible.

 

 

 

 

 

Lorsqu’un système privilégie la concurrence, la compétition, voire la rivalité, la protection de l’ensemble en est forcément menacée, à tous les niveaux.


Former le personnel et prendre des mesures en matière d’unité, de solidarité, n’est peut-être pas la meilleure voie pour exercer un pouvoir absolu sur les personnes qui composent l’entreprise, mais c’est certainement la meilleure pour assurer une protection optimale tant à ces personnes qu’à l’entreprise elle-même.


L’organisation professionnelle qui semble, en tout cas dans l’imagerie populaire, correspondre le mieux pour illustrer l’esprit que doit adopter une entreprise en son sein afin de développer le potentiel de ses collaborateurs pourrait être « l’Association Ouvrière des Compagnons du Devoir du Tour de France » : excellence, innovation, accueil, communauté, transmission et partage font partie de son ADN.


N’ont-ils pas l’air heureux ? Peut-être le monde de l’entreprise pourrait-il s’en inspirer pour évoluer…

 

 

P.S. : Patrice, où es-tu sur la photo, je n’ai pas réussi à te trouver…

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