Dans quatre précédents posts, nous avions vu quatre des caractéristiques de l’entreprise responsable, à savoir qu’elle se devait d’être honnête et juste, puis une citoyenne active, puis employeur responsable, enfin protéger le futur commun.
Le cinquième et dernier chapitre abordant la nature d’une entreprise responsable concerne sa capacité à inscrire ses performances dans la durée.
En la matière, deux critères semblent à retenir :
. le choix et la constance de l’objectif de l’entreprise,
. l’ouverture au contrôle public de la cohérence entre l’objectif et l’activité réelle.
Le choix de l’objectif est, tout le monde en conviendra, un élément primordial définissant la mission que se donne une entreprise.
Faire, de gagner de l’argent, l’objectif premier de l’entreprise est-il un objectif valide ? Les banques qui font de la spéculation en millisecondes poursuivent-elles un objectif durable ?
Certains pourront vous répondre par l’affirmative, considérant que cela permet de faire des profits, donc de payer des employés, qui, eux-mêmes, réinjectent le l’argent dans l’économie et peuvent ainsi se nourrir et vivre, prolongeant la présence de l’être humain sur terre, et donc servant la société.
Et ils n’ont pas tort à un certain niveau.
Toutefois, cette activité ne créée pas de richesse concrète, c’est un jeu à somme nulle. Ce que gagnent les uns, c’est ce que perdent les autres. Ce n’est qu’un transfert de richesses vers ceux qui ont les ordinateurs les plus performants.
C’est là où la notion de choix de l’objectif prend son sens et sa difficulté.
Car on pourrait imaginer, purement théoriquement, une banque faisant de la spéculation en millisecondes se servir d’une part importante de ses profits pour financer des actions humanitaires, sociales ou caritatives.
L’objectif serait sans doute noble, mais serait-il en accord avec la notion de responsabilité à long terme que doit intégrer une entreprise dite responsable ?
En d’autres termes, Robin Des Bois poursuivait-il un objectif qui serve la société et respecte la dignité des personnes en volant aux riches pour donner aux pauvres ?
Même si c’est sans doute mieux de donner le produit de ses larcins aux pauvres plutôt que de le garder pour augmenter sa fortune personnelle, cela reste un jeu à somme nulle que l’on peut résumer par le proverbe : « le bonheur des uns fait le malheur des autres ».
A partir du moment où l’activité d’une entreprise est basée sur le fait de générer du malheur pour certains, il est peu vraisemblable qu’elle s’inscrive dans les critères évoqués ici.
Et c’est là que réside toute la difficulté, car toute entreprise qui pollue un tant soit peu génère une forme de malheur pour certains.
Il ne s’agit donc pas de considérer que tout activité qui génère des déchets n’est pas une activité responsable – dans la mesure où ils peuvent être retraités, valorisés ou simplement compensés - mais de faire le choix d’une activité ayant un objectif résolument tourné vers le « gagnant-gagnant ».
Cela paraîtra utopique à certains, mais force est de constater que l’objectif de beaucoup d’entreprises pourrait être en accord avec ce principe. Il suffit souvent de produire une réflexion en profondeur, d’adapter les modes de fonctionnement et d’être constant dans la démarche pour parvenir à respecter la société et préserver la dignité humaine.
Concernant le juste retour à des investisseurs responsables, il faudrait définir le mot « juste retour » et il ne semble pas réaliste de vouloir le faire d’une manière générale. C’est un équilibre à trouver au cas par cas, en fonction des investisseurs et, vouloir normer la chose arbitrairement ne semble pas être susceptible de remporter une adhésion unanime, donc ne pas être possiblement durable.
En la matière, encore une fois, ce sont les valeurs de vie personnelles des personnes (les investisseurs en l’occurrence) qui doivent être travaillées pour parvenir à l’équilibre souhaité.
Le point du contrôle public est primordial pour tous :
. Pour la société dans son ensemble, afin d’assurer la cohérence de l’évolution de chacun par rapport à des contraintes sociétales en perpétuelle évolution.
L’entreprise, en toute bonne foi, peut ne pas avoir connaissance de données prenant en compte l’ensemble de la société et c’est à cette dernière que revient le rôle de l’en informer et de l’accompagner dans d’éventuels ajustements.
. Pour l’entreprise elle-même, car il constitue un appui pour lui permettre de s’assurer des dérives possibles que le temps peut provoquer dans l’application d’une démarche initiée comme positive, mais possiblement perdue de vue sous l’effet des impératifs quotidiens.
Si l’entreprise s’inscrit dans une démarche responsable de bonne foi, elle ne peut redouter l’examen public (si tant est qu’il soit normé et garantit par des possibilités de recours indépendants) et le considérera comme une aide précieuse.