J’ai déjà abordé le sujet de la procrastination précédemment (Cf. « Procrastination : qu’est-ce que cela vous coûte et comment y remédier ? ». Le sujet peut parfois être complexe, dans ce sens que, si, pour certains, procrastiner est une attitude répétitive et concerne tous les sujets perçus comme ennuyeux de la vie quotidienne, d’autres ne procrastinent que dans un seul domaine. Il s’agit de ce que j’appelle la procrastination sélective.
Si vous procrastinez pour prendre votre douche ou aller faire des courses, vous conviendrez que ce n’est pas forcément un drame absolu… (pour la douche, toutefois, si vous procrastinez trop longtemps, cela peut quand même avoir de sérieuses répercussions sur votre vie sociale…).
En revanche, si vous procrastinez pour rechercher un travail, votre situation globale peut rapidement se dégrader au point de devenir hors de contrôle.
Et c’est exactement la situation que connaissait une jeune femme d’une trentaine d’années que j’accompagnais.
Intelligente (elle avait brillamment obtenu son diplôme d’avocat), jolie comme un cœur (d’une beauté emprunte d’une certaine classe, pas une beauté à la Nabila, même si je n’ai rien contre cette dernière), un sens certain des valeurs de vie, entourée d’une famille aimante, elle avait absolument tout pour réussir sa vie.
Pourtant, depuis l’obtention de son diplôme, elle se sabordait allègrement en ayant tout fait pour foirer son stage de fin d’études et en procrastinant ensuite pendant un an et demi pour envoyer des CV et entamer réellement une recherche de collaboration au sein d’un cabinet.
Economiquement à la dérive, elle est venue me voir concernant un problème de confiance en soi.
Et c’est vrai qu’elle avait perdu toute confiance en soi, et même toute estime de soi.
Se fiant au fait qu’elle ait foiré son stage de fin d’études, elle se considérait comme stupide ; physiquement elle en était venue à se trouver laide au point qu’elle envisageait très sérieusement le recours à la chirurgie esthétique (au secours ! si vous voyiez comme elle est jolie !) ; quant à son sens des valeurs, en pratique il était en jachère et ne lui servait plus à rien tant elle était perdue.
Un naufrage à fendre le cœur !
Après exploration infructueuse de plusieurs pistes pour l’aider à reprendre confiance en soi, nous nous sommes focalisé sur ce qu’elle décrivait comme une procrastination pathologique générale.
Nous nous sommes rapidement aperçu que, dans les faits, sa procrastination était une procrastination sélective et ne concernait que sa recherche d’emploi. Tous les autres domaines de sa vie étaient vierges de toute procrastination.
La réalité des faits est qu’elle s’était inventé un personnage durant son stage en cabinet afin, pensait-elle, de mieux s’intégrer à son environnement. Issue d’un milieu très simple (père absent et mère femme de ménage), elle avait tout fait pour paraître venir d’un milieu privilégié.
Jouant un rôle à l’opposé de sa vraie personnalité, elle s’était fourvoyé dans ses relations avec les personnes du cabinet, s’était davantage concentrée sur l’image qu’elle renvoyait plutôt que sur le travail qu’elle produisait et se retrouvait dans une vie à laquelle elle ne s’identifiait plus du tout.
Elle était dans l’impossibilité de faire fructifier ses relations acquises durant son stage, car elle aurait dû continuer dans un mensonge intenable.
Elle en avait conçu un dégoût pour la carrière d’avocat et sa procrastination ne correspondait qu’au fait qu’elle n’avait plus du tout envie de suivre cette voie professionnelle dans les conditions qu’elle avait elle-même créées.
Ses envies de carrière étaient désormais : fleuriste, artisan chocolatier ou naturopathe.
Nous avons donc commencé par nous attaquer à l’habitude qu’elle avait prise de mentir continuellement et elle s’est assez rapidement plié au fait de ne plus mentir, mais de travailler plutôt sur les manières de présenter la vérité, en accord avec ses valeurs de vie.
Ne mentant plus, elle n’avait plus à paniquer continuellement pour parvenir à conserver une cohérence dans ses mensonges.
Adoptant une démarche de cohérence par rapport à ses valeurs de vie, elle s’en est trouvé apaisée dans un premier temps et renforcée ensuite dans sa « présence à sa vie ».
Ce faisant, elle s’est rendu compte que, dans les faits, elle voulait réellement être avocate et que ses envies de carrière aussi diversifiées qu’improbables pour elle, n’étaient que l’expression d’une forme de fuite.
L’histoire se termine plutôt bien : afin de retrouver une situation financière stable, elle s’est remise au travail en prenant des missions d’intérim en secrétariat juridique. Elle s’est réinvestit dans la recherche d’un cabinet d’avocat, qu’elle a trouvé et il reste encore à voir si ce cabinet va lui convenir à long terme ou non.
Le point auquel je veux en venir est d’attirer l’attention de ceux qui procrastinent sur le fait que : d’une part ce genre de travers peut vite mener à la destruction de la personnalité, donc de la vie, et que, d’autre part une procrastination sélective (ne concernant qu’un aspect de la vie) peut se révéler provenir davantage d’un message de l’inconscient que d’un défaut personnel.
Si votre procrastination se manifeste seulement sur un aspect de votre vie, et sur un aspect important comme la recherche d’un travail, d’une relation sentimentale ou autres, ne vous laissez pas enfermer dans cette situation.
Il peut être difficile de faire la part des choses soi-même. Quand on a la tête dans le sac, savoir ce qui provient d’un message de l’inconscient ou d’une simple paresse passagère n’est pas évident.
Faites-vous aider. Ce problème n’est pas assez grave pour que vous gâchiez votre vie sans réagir. Un accompagnement passager devrait suffire pour vous permettre de renouer avec une vie pleine et épanouissante.