Parmi les a priori auxquels doit faire face la démarche de développement personnel, l’un des principaux est que ce serait une démarche un peu « hors sol », déconnectée du concret, de carrément sacrifier le concret.
Nous avons tous en tête toutes ces illustrations de personnes en train de méditer, emplies de sérénité, qui jouissent d’une espèce de bonheur extatique, au milieu d’une verdure chatoyante, dans un monde plein d’harmonie.
Tant mieux pour eux et je trouve ça super de pouvoir se ressourcer en « communiquant avec l’univers ». L’harmonie intérieure me semble, effectivement, un passage important pour parvenir à se construire une belle vie et un aboutissement personnel qui justifie un travail intensif pour y parvenir.
De même, vous m’entendez fréquemment parler (ou plutôt « poster ») de valeurs de vie. Mais, est-ce un Graal ? L’objectif d’une démarche de développement personnel est-il de se plonger dans sa dimension spirituelle pour vivre une béatitude désincarnée ?
Évidemment, vous me voyez venir. De la manière dont la question est posée, vous savez déjà que ma réponse va être négative… mais pas seulement.
En effet, s’il semble évident que la dimension matérielle reste définitivement le seul juge de paix de la réussite d’une démarche de développement personnel, elle doit trouver sa source dans une approche plus globale pour prendre son sens et sa portée réelle.
Attention, j’entends l’action concrète au sens large. Avoir une vie de famille épanouissante, une relation amoureuse intense, fait partie des actions concrètes d’une vie. C’est le résultat de beaucoup d’actes tangibles.
Je me souviens, il y a de nombreuses années, quand j’étais encore jeune et beau (merci de ne pas me contredire sur ce dernier qualificatif), une jeune fille que je ne laissais pas indifférente, pour aller dans le sens d’un rapprochement, me disait : « j’aime énormément me retrouver seule, la nuit, au milieu de la nature, méditer et être en communion avec les étoiles et l’univers ». Elle était rousse, jolie comme un cœur et touchante, mais je n’ai pu m’empêcher de lui répondre : « oui, c’est très bien, mais tu en fais quoi après ? ». Et là… regard interloqué de sa part… elle comprenait la remarque, mais ne s’y était pas préparée.
Vous pourrez constater que, question drague, je n’étais pas forcément un champion…
Mais au-delà de ça, imaginons que l’on ait raison de penser que l’être humain, et le vivant en général, soient constitués des trois dimensions que vous connaissez : les dimensions physique, psycho-émotionnelle et spirituelle.
Quelqu’un peut-il me dire pourquoi la Vie se serait embêtée à élaborer toute la complexité de la dimension physique si ce n’est parce qu’elle a une importance cruciale ?
Si c’était pour que nous ne vivions que dans une spiritualité béate, point n’était besoin de disposer de tout ce concret lourd, complexe, « imparfait » et problématique.
De même, si nous ne devions être que des cerveaux remuant des idées et des émotions, le concret n’aurait pas grand intérêt. Nous serions beaucoup plus libres dans nos pensées si nos raisonnements n’avaient pas à prendre en compte la dimension concrète.
Mais la réalité c’est que notre vie incarnée est, comme son nom l’indique, indissociablement liée à la matière. Tous les beaux esprits et les grands spirituels de la terre peuvent aller se rhabiller, car si on ne donne pas son sens fondamental à la dimension matérielle, aucun raisonnement profond, aucune démarche spirituelle, ne tient réellement la route.
Certains qui croient (ou pas) en une conscience supérieure et créatrice pourraient se dire que la dimension matérielle n’est qu’un furoncle sans utilité, une excroissance plus ou moins volontaire, comme un panaris à l’orteil, d’une divinité désabusée. Ou bien on peut se dire que notre vie a un sens qui est directement en rapport avec notre statut d’incarné et que notre action concrète a une importance prépondérante.
Donc, je jette (provisoirement) les valeurs de vie à la poubelle, car ma seule préoccupation c’est le concret !
Oui, mais au fait… le concret est certes primordial, mais a-t-il du sens en lui-même ? J’agis… très bien… mais pour faire quoi ? Je travaille toute la journée, ma vie s’égrène jour après jour dans des occupations parfois passionnantes, parfois moins, mais quel est mon objectif profond ?
SACREBLEU !!! Pourquoi me suis-je incarnÉ ????
Des trois dimensions du vivant (physique, psycho-émotionnelle et spirituelle), il semble bien qu’aucune ne prédomine sur les autres et qu’elles fonctionnent de façon optimale quand elles se complètent les unes les autres, avec la même importance et la même intensité.
A la question : « pourquoi travaillez-vous ? » des réponses diverses peuvent être apportées :
Cette complémentarité permet de se satisfaire un certain temps de son labeur quotidien. Pour certains, cette satisfaction dure tout au long de la vie professionnelle, car ils n’ont pas appris, ni ressenti qu’il pouvait y avoir autre chose dans leur vie. Et c’est très bien pour eux.
Mais pour d’autres, l’intérêt intellectuel ne suffit qu’un temps. Il arrive plus ou moins précocement qu’ils remettent cet intérêt en question en tant que principal élément de vie. Intervient alors la « crise de la quarantaine » qui peut survenir à n’importe quel âge. L’insatisfaction est grande et pousse à remettre en question l’ensemble des aspects de sa vie. Ce n’est généralement ni confortable, ni satisfaisant.
Selon certaines études (dont je n’ai pas vérifié la démarche), l’utilité sociale (mais cela pourrait sans doute être vrai avec d’autres valeurs de vie) se classe dans le TOP 3 des motivations profondes au travail.
Ce n’est pas un hasard, c’est simplement que, si vous recherchez un sens à vos actions, faire appel à votre dimension spirituelle est le seul moyen de les inscrire dans le fondamental.
Je n’évoque pas cela pour dire que les valeurs de vie constituent l’alpha et l’oméga. Je reste convaincu que seule leur expression finale dans la dimension concrète à réellement de l’importance.
Vous pouvez partir d’une action concrète (dimension physique), vous demander comment vous avez réussi à la réaliser (dimension psycho-émotionnelle), puis enfin pourquoi vous l’avez réalisé (dimension spirituelle).
L’alternative est de définir un sens à sa vie personnelle (dimension spirituelle), trouver les types d’actions qui pourraient être mis en place en correspondance avec le sens donné à sa vie (dimension psycho-émotionnelle) et, enfin, réaliser dans le concret lesdites actions (dimension physique).
Les deux démarches peuvent se défendre, mais je reste convaincu que la seconde est plus aisée, plus harmonieuse, plus efficace et évite de nombreuses mésaventures.
La dimension concrète est indubitablement le juge de paix de notre passage dans ce monde. Cependant, elle ne fonctionne positivement pour nous, que si elle s’inscrit dans une complémentarité harmonieuse avec les deux autres dimensions.
C’est pourquoi, au lieu de se noyer dans un quotidien dans lequel la dictature du concret empêche toute complémentarité des dimensions humaines, accordez-vous un peu de temps pour réfléchir et définir le sens de votre vie. Il est possible, bien évidemment, de le faire seul, mais il est plus rapide et souvent plus efficace de se faire accompagner dans cette démarche.
La raison en est qu’en réfléchissant de concert avec quelqu’un, le panel de solutions est plus étendu et vous aurez donc plus de chances de trouver celles qui optimisent votre vie actuelle sans la bouleverser du tout au tout. Les coaches de vie sont là pour ça…